jeudi 4 juin 2009

Article NR 12 Loin des yeux, loin du peuple


Loin des yeux, loin du peuple

Mardi 31 mars, Nicolas Sarkozy est venu à Châtellerault pour parler de la crise, notamment de la fermeture d'usines, du chômage : Valéo, les Fonderies du Poitou... Cette visite a provoqué une émeute à Châtellerault.

Sécurité XXL Mardi 31, jour J, jamais on n'avait vu autant de forces de l'ordre à Châtellerault ! Les accès à certains lieux étaient bouclés par des barrages, vers le Chillou, en particulier. On se demande pourquoi le déplacement du président nécessitait autant de sécurité : croit-il qu'il n'est pas aimé de la population ? Peut-être les manifestations ont-elles montré qu'il n'était pas le bienvenu à Châtellerault...
Première manif Pour un petit nombre d'entre nous, la première manifestation à laquelle nous avions assisté était celle qui avait été organisée en soutien à la Palestine lors de la guerre à Gaza.
Pour d'autres, celle du 31 mars, aux côtés des syndicalistes, était une grande première. Beaucoup d'ambiance, des rires car les manifestants étaient venus protester contre la politique du gouvernement ; des chansons, parfois drôles, animaient le défilé...
Premiers affrontements, beaucoup de bruit pour... rien Après la manifestation, des jeunes ont brûlé une poubelle, et jeté des cailloux, dans le feu de l'action... des oeufs, des bouteilles de bière... Nous étions dans la manif, nous ne sommes pas allés au collège l'après-midi : il fallait contourner les barrages, passer par la Maronnerie, ça fait plus long... Et puis, pour une fois qu'il se passait quelque chose à Châtellerault... Pour notre classe, il n'y avait pas cours ce mardi après-midi-là... Nous avons jugé que la présence d'autant de CRS, de barrages, pour un président que l'on ne voyait pas, c'était un peu de la provocation.... On a apprécié ce mouvement dans la Plaine, mais on n'a jamais vu Nicolas Sarkozy... Cela faisait beaucoup pour... rien.
Un mot pour les CRS Ce n'était pas contre eux, la rage, même si on avoue avoir du mal à voir en eux l'homme, derrière la police en charge de la sécurité des citoyens : c'était une rage contre Nicolas Sarkozy, de la part des manifestants. Les CRS ont reçu des oeufs en faisant leur métier : protéger un homme d'état, que peut-être eux-mêmes n'apprécient pas... Les CRS ont fait pitié à certains d'entre nous, car ils ne méritaient pas cela. Si certains ont menacé des adolescents, ceux-ci les avaient provoqués. Nous, on a reçu des bombes lacrymogènes, sur les pieds, dans les yeux, ça brûle !!! Les CRS jetaient des fumigènes sur ceux qui s'approchaient trop près. C'est pour ne pas lutter qu'ils jettent ces projectiles. Des arrestations ont eu lieu, puisque des jeunes avaient cassé une voiture et jeté des projectiles sur les forces de l'ordre.

« On se croyait un 14 juillet » « C'était bizarre, on se croyait un 14 juillet, jour de fête nationale. Les routes étaient barrées par la police, on n'avait même pas le droit de passer par Branly. De chez moi, j'entendais des bruits, je suis sorti pour voir, j'ai vu des groupes de personnes avec des tambours, en train de chanter. Je les ai suivis. Ils sont passés vers Branly mais les gendarmes ne voulaient pas qu'on passe. En ville, il y avait des barrières de sécurité partout. » Aynou.

Le courage de manifester ses opinions « Je trouve que les manifestants ont eu le courage de manifester contre la venue du président de la République. Ils ont eu raison, selon moi, car il faut agir, mais ils ont également eu tort car la venue du président prouve qu'il s'intéresse à la crise. Malgré sa venue, je trouve vraiment grave qu'il ne se montre pas : il est censé parler au peuple, se montrer à lui ! Il n'y avait jamais eu autant de CRS à Châtellerault, même après son départ, la police était encore là : cela a un peu provoqué les jeunes. Sur le chemin du collège, vers Branly, les CRS étaient encore postés là alors que Nicolas Sarkozy avait déjà quitté la ville ! Il n'était pas nécessaire pour la police de rester en ville. Aux jeunes, on a montré que le président est puissant ; mais lui ne s'est pas montré. Je ne comprends pas pourquoi il y a eu autant de barrières entre lui et le peuple. Elu, il devrait assumer son peuple ! Pour moi, sa visite a fait plus de dégâts qu'autre chose... Mais pour nous, cela a mis de l'ambiance... » Myriam.

Une journée ordinaire ? « Je n'étais pas au courant que Nicolas Sarkozy venait à Châtellerault : je ne le croyais pas. Quand j'ai vu beaucoup de policiers sur les routes et des gendarmes passer devant moi, je me suis dit que c'était vrai... J'ai vu quelques images de cette visite à la télévision, le soir. Pour moi, c'était une journée comme les autres.» Léa.
Nawal, Myriam, Astan, Fanta, Julie, Raby, Fatima, Léa, Audrey, Zakary, Okkacha, Charlotte, Amandine, Maïly, Amrane, Gisela, Kholoud, Jérôme, Ibrahim, Aynou.

Policier : un métier au service des citoyens
Nous avons invité le Capitaine Martineau, chef de l’’Unité de Sécurité au commissariat de Châtellerault dans notre classe, afin de l'interviewer sur le métier de policier et les missions de la police. Nous le remercions pour cet échange.

Elèves : Quelle est la mission de la police dans le cadre d’une manifestation ?
Capitaine Martineau
: La mission des policiers est de maintenir l'ordre public, de protéger les personnes et les biens. Une manifestation, c'est un droit. Mais on ne manifeste pas n'importe comment. Une déclaration est faite en préfecture, le trajet est déterminé, le lieu de dislocation de la manifestation également. Tout cela est généralement respecté par les syndicats appelant à la manifestation. Dès le départ du cortège, les policiers sont là pour éviter les délits : quand il y a un rassemblement de personnes, il est plus facile de commettre des délits, les comportements sont souvent différents quand on est en groupe, l'anonymat y est plus facile. On doit protéger les manifestants, et les citoyens qui ne défilent pas.
Elèves : Qu'est-ce que signifie le sigle CRS ?
Capitaine Martineau
: Compagnie Républicaine de Sécurité. Les CRS ont été créées en 1945, à la Libération. Ce sont des compagnies -ou forces de sécurité- auxquelles un préfet fait appel de façon ponctuelle.
Elèves : Quelle est leur mission dans le cadre d’une manifestation?
Capitaine Martineau
: En aucun cas faire peur. Leur mission est de protéger les citoyens des délinquants, en dissuadant ces derniers.
Elèves : Comment devient-on CRS ?
Capitaine Martineau
: Un CRS est un policier. Pour entrer dans la police, le concours de recrutement demande un baccalauréat pour les gardiens de la paix, une licence pour les officiers et 1 DEA ou DESS (bac+5) pour les commissaires. Il est préférable de privilégier les études de droit pour se présenter au concours.
Ihsane : Existe-t-il des femmes CRS ?
Capitaine Martineau
: Le concours de policer leur est ouvert et la direction des CRS aussi. Mais en CRS, il y a peu de femmes car cette spécialité leur a été ouverte très récemment.
Elèves : On voit les CRS casqués, ils font peur...
Capitaine Martineau
: Les casques sont utilisés pour se protéger, ils ne sont pas utilisés pour faire peur. Tous les policiers, et pas seulement les CRS peuvent aussi mettre un casque pour se protéger. Il faut savoir que les CRS français sont des experts du maintien de l’ordre et leurs compétences les amènent à former de nombreuses polices étrangères.
Ihsane : Ils rôdent dans les rues du quartier.
Capitaine Martineau : Ils « patrouillent ». Imaginez-vous un pays sans police ?
Astan : Ce serait la loi du plus fort.
Capitaine Martineau
: Exact.
Zakari : Utilisez vous des armes dans une manifestation ?
Capitaine Martineau
: C’est possible, la loi le permet dans le cadre de la légitime défense. Quand on lance des pierres sur les policiers, les pierres sont considérées comme des armes.
Zakari : Nous, on fait des batailles de marrons, des batailles de pierres souvent !
Capitaine Martineau
: Minimiser l'acte de lancer des pierres est choquant. Vous devriez y réfléchir. Vous devriez écrire un prochain article sur les blessés: allez faire une enquête aux urgences de Châtellerault...
Elèves : Pourquoi, le jour de la visite de Nicolas Sarkozy à Châtellerault, les CRS sont-ils restés devant Branly après le départ du président ?
Capitaine Martineau : Les policiers doivent permettre la dislocation d'une manifestation dans le calme, et empêcher tout débordement. Devant Branly, il se trouve qu'une voiture venait d'être cassée, que des pierres avaient été jetées sur les policiers, que le feu avait été mis à des poubelles. La police lutte aussi contre les violences urbaines, elle n’est pas l’ennemie des citoyens.
Elèves : On se dit parfois qu'on peut jeter des projectiles sur les CRS, qu'ils sont là pour ça.
Capitaine Martineau : Etre pris pour cible fait partie des risques du métier, mais ne croyez pas que les forces de l’ordre soient là pour recevoir des pierres, des oeufs ! La loi punit cet acte. Ces violences sont réprimées.
Elèves : Que risque un mineur qui a lancé des projectiles sur les policiers ?
Capitaine Martineau
: Une agression de fonctionnaire de l'Etat dans l'exercice de ses fonctions, constitue une circonstance aggravante, c'est comme un professeur, un chauffeur de bus : l’Etat, par la loi protège ses fonctionnaires. Quand les policiers interpellent un jeune qui a lancé des pierres, ils mènent une enquête pour établir les faits, puis la personne est présentée à un juge ; charge, ensuite, au juge, d'établir la peine. Pour un mineur, la peine maximale encourue est divisée par deux.
Elèves : Que pensez-vous des personnes qui manifestent en se cachant le visage ?
Capitaine Martineau
: quand on manifeste pour ses opinions, on devrait le faire à visage découvert. Ceux qui se dissimulent ne sont pas forcément là pour défendre des idées. Cagoules, foulards, capuches, masques sont portés pour se dissimuler, ne pas être reconnus, ne pas être identifiables…..

Interview réalisée par la classe de 3ème1.




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